Textes de Dominique C.
Leur vie, pas la mienne
Nous sommes le 22 mai 2017, il est un peu plus de 23 heures.
Partout dans la grande maison c'est le silence.
Mon mari dort paisiblement dans notre grand lit. Ma vieille chienne dort sur son canapé.
Et moi, je suis seule… Seule devant mon écran, seule dans tout ce noir et j'écris ces quelques mots que personne, sans doute, ne lira jamais.
J'ai 66 ans. J'ai passé ma vie à me battre. Contre les autres !! Contre moi-même, contre la vie que l'on croit si belle à 20 ans, et que l'on doit apprendre à apprivoiser, à dompter et à en sortir vivant coûte que coûte.
A l'aube de mes 70 ans, je me sens calme et sereine. Dans ma longue vie, j'ai fait de belles choses, comme mes enfants par exemple, mon mariage, et de moins bonnes que j'essaye d'oublier.
Je ne sais pas si j'ai réussi, mais en tout cas, j'ai essayé.
J'ai eu 3 enfants. Je les ai aimés, chacun à sa façon, ça n'a pas été toujours facile, ni pour moi, ni pour eux.
Mais, tant bien que mal, ils ont grandi, et, au fil des ans, un par un, ils sont partis vivre leur propre vie, pas toujours celle que j'aurais souhaité…
Mais c'était leur vie, pas la mienne.
A présent, j'ai 8 petits enfants, 3 filles, 5 garçons. Je les regarde vivre et grandir à leur tour. Eux aussi un jour partiront vivre leur vie, vers d'autres horizons.
Eux aussi feront leurs expériences, apprendront de leurs joies, de leurs erreurs, de leurs victoires, de leurs échecs.
Mais ce sera leur vie, pas la mienne.
Quand je leur prends la main, quand je les prends dans mes bras, que je les embrasses, je voudrais que le temps s'arrête, qu'ils restent ce qu'ils sont maintenant : des enfants.
Je les sens si petits, si fragiles, je me demande ce que sera leur avenir et je me dis qu'avec un peu de chance je serai là pour les voir grandir.
Dans quelques jours, nous fêterons nos 42 ans de mariage. 42 ans de joie et de tristesse.
42 ans de cris et de pardons, 42 ans d'amour ou de haine selon les jours, selon nos humeurs du moment.
Finalement, quand j'y réfléchis, quand je tourne la tête vers mon passé, je me dis que j'ai de la chance. J'ai un bon mari, des enfants et des petits enfants en bonne santé, une belle maison, un bon compte en banque que je ne dois qu'à nous, à Bernard et moi. A personne d'autre.
Je souhaite à mes enfants et à mes petits enfants tous les bonheurs qui on semés ma vie et qu'on m'ont finalement rendue heureuse.
Je leur souhaite une vie pleine de joie, pleine de santé, pleine de vie mais ce sera leur vie, pas la mienne.